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qu’elles autorisent, par procuration, nous permettent de tout vivre, de tout
réaliser et peut-être de trouver une forme de bonheur ?
Certaines « histoires » de Jean Rambaud nous montrent comment
réagissent les personnages suite à un évènement modifiant brutalement et
de manière imprévisible leur parcours. Nous sommes là dans le registre
«
classique » du genre de la nouvelle : une tranche de vie, un instantané
au cours duquel se produit un élément déclencheur de nouveaux
comportements, d’une prise de conscience voire d’une révélation.
Mais aussi, sur la scène de son théâtre de personnages, Jean Rambaud tente
de mettre à nu les mécanismes («
les choses
»)
secrets qui tirent les ficelles
qui les font agir. « Qu’est-ce qui les fait courir ? » est la question qu’il se
pose et nous pose en nous donnant des éléments de réponse. (
Qu’est-ce qui
fait courir John Briant ?
est un des titres de ses romans).
Dans ce registre, les nouvelles de Jean Rambaud sondent les racines
profondes des hommes, de l’espèce, des individus, qui les relient à la vie
et éclairent leurs comportements. Les racines, comme les végétales, par
la chaîne des filiations et par les lieux où nous sommes nés, où nous vivons,
d’où nous venons. (La plupart des nouvelles sont « ancrées » dans les lieux
où a vécu Jean Rambaud et se déroulent souvent soit à Paris, soit en Provence.)
A ce titre, son œuvre - et en particulier les nouvelles -, celles qui se passent
en terre provençale, sont un hymne à la Provence, à la lumière, à la mer et
à la femme qui en est l’expression la plus vivante et la plus sublime jusqu’à
la confusion, la fusion : «Notre pays, le village des Arnaud (…) Loin de
la mer, au contraire, au cœur de la Provence, sur les plateaux… C’est ça,
voilà, au dessus de Manosque, entre Lubéron et Lure ! Les Adrets, pardi !»
(
D’amours…et d’autres).
«
Cette colline libre, cette mauvaise terre d’odeurs
et de couleurs, sans cultures, sans champs, sans lopins, qui tolère
seulement genêts et messugnes, l’or et le rose fragile, par-dessus le maquis
court du thym, des kermès, de la bruyère maritime. Je vivais enArcadie. Je
vis en Arcadie.»
(
Espèces d’individus),
(
Il s’agit de Toulon).
«
Elle rit ici. Elle est née de ce pays. Il est gros de violences muettes et
sourdes mais aussi d’éclats de lumière, de joie. Il est gros de vie. Ici, le
vent de glace des hivers lance en été devant lui le feu qui mange les bois.
Ici, le gel fait éclater les pierres et d’un jour à l’autre, le soleil fou s’abat
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